Le four à ban est mentionné dès 1550 dans l'enclos du prieuré, selon l'aveu du prieur de l'époque :
"Et c’est a scavoir la maison prioralle avec ses estables basse court jardin vergier ung parc et ung four a ban avec son jardin toutz ensembles contenant envyron ung journau et demy de terre feran d’un endroict sur ladicte eglie d'autre endroict sur la maison avec son jardin du vicaire d’icelui prieure que a presant tient et où demeure maistre Yves le Gentil d’aultre endroict sur la rue appellé la rue du Parc d’aultre endroict sur la maison et jardin de missire Paul le Carn pretre et d’aultres endroicts sur la maison et jardin Henryette Calvez oupvrant sur la place du marché dela ville dudit Sainct Renne du Boys. Ledict four a ban peut valloir par communs ans de ferme vignt livres monnoye par chacun an"
Cette description est reprise dans l'aveu de 1680 :
"Plus un four à ban auquel tous les manants et habitants dudit prieuré sont tenus et obligés d’y faire cuire leurs pains et de payer le droict à la manière accoutumée ledit four ayant d’étendue huit cordes et joignant ladite églize priorale".
Le four était loué par le prieur au fournier : François Clévian paye 240 livres en 1718, Jean Ligavan 304 livres en 1777, de même que Lazard et Hervé Douérin en 1783 et en 1787.
Cette situation va durer jusqu'à la révolution ; en 1783, les sujets reconnaissent encore qu'ils doivent "suivre le four et le moulin". Mais après la nationalisation des biens du clergé, il sera expertisé1 le 10 Juin 1791 :
"La maison à four couverte de paille avec son four construite en partie de simple maçonnage. Le four garantis de réparation ayant de diamettre dix pieds, la maison ayant deux longères et un pignon et demy, charpente et couverture ses autres éligements aussy garantis de réparation le tout contenant sous plate fond compris issue endroit soit deux cordes un sixiesme, le tout prisé par le menu et en détail compris le fond avec les édifices et trouvé monter à la somme de six cent trente livres, ledit four cy devant nommé le four banal de Locronan dépendant du cy devant prieuré dudit Locronan Saint Ronan des bois et tenu à ferme par Hervé le Douarin "
et vendu2 le 16 juin 1792 au fournier de l'époque Hervé le Douérin :
"Le four banal de Locronan et sa maison, un premier feu allumé a été fait valoir par Hervé Lazard Douérin pour 950 livres. Un deuxième feu allumé et éteint sans autres enchères, le Directoire a adjugé ledit four banal de Locronan et maison en dépendant audit Hervé Lazard Douérin pour ladite somme de neuf cent cinquante livres, lequel Douerin présent qui demeure en la ville de Locronan promet et s'oblige de paier sous quinzaine entre les mains du receveur du district la somme de cent quatre vingt dix livres et les huit autres dixièmes de ladite somme savoir un dixième le jour en un an un autre six mois après et ainsi de continuer de six mois en six mois, et de se conformer aux dispositions du décret et a ledit Douerin déclaré ne savoir signer et l'a fait pour lui Pierre Brunou."
Selon une autre expertise du 27 messidor an IV, les 2 maisons situées entre le four et l’église Saint-Ronan appartenait aussi au prieuré, la première étant :
"une maison occupée par ledit Ollivier Moreau adossée au pignon du couchant de la maison à four de Locronan construite en simple maçonnage ouvrant au nord sur une issue ou petite place nommée leur an autrou donnant du levant sur ladite maison à four du couchant sur la maison cy après désignée du nord sur ladite issue ou petite place nommée leur an autrou et du midy sur le cimetière dépendante de la dite église de Locronan..."
Ces 2 maisons seront vendues le 24 floreal an VI à Poulizac, faisant pour Damey.
On retrouve le nom de ces acheteurs sur le cadastre de 1808, où l'ilot 383 contient 3 maisons dont 2 appartiennent à Claude Damey et l'autre à Hervé Douérin. Mais sur le cadastre de 1847 cet ilot est formé des quatre lots 87, 88, 89 et 90. Le cadastre nous apprend qu'ils appartiennent aux mineurs d'Alain Salaun, de Guengat (lots 90 et 89), à Pierre Roignant, de Quéménéven (lot 88) et à Eugène Damey (lot 87). Ils subiront des petites cessions à la voie publique dans les années 1860-70, sans doute pour élargir la route. Toujours d'après le cadastre, Emmanuel Princelle, gendarme à la retraite devenu épicier, entre en possession des lot 89 en 1871, 90 en 1872, et 88 en 1881. En 1876, une construction nouvelle est enregistrée pour le lot 89 dit "four banal". Le four se trouvait donc approximativement face à la poste actuelle.
Nous ne savons pas exactement ce qu'était cette construction nouvelle. La maison actuelle a été construite sur les lots 89 et 88, qui deviendront le lot 70 d'un nouveau cadastre.
Quelques clichés montrent l'évolution de la rue dans le temps :
Les ruines de la fin du XIXème siècle ont été remplacées par deux maisons nouvelles, recouvertes d'un crépit blanc, enlevé ces dernières années. Plus récemment, un garage est venu combler l'espace entre les numéros 70 et 68 (cadastre1932), une devanture de magasin est créée.
La maison numéro 70 sera mise en vente aux enchères le 3 mai 19383 ; elle est ainsi décrite :
"Une maison d'habitation construite en pierre, couverte d'ardoises, composée de rez de chaussée, étage et grenier, ouvrant du nord sur la route de Châteaulin à Douarnenez par une porte et deux fenêtres au rez de chaussée, trois fenêtres à l'étage, et deux lucarnes au grenier, ayant son pignon levant mitoyen avec le sieur Bourbao, donnant du sud sur le cimetière de Locronan, du couchant sur la cour ci-après désignée, figurant à l'ancienne matrice cadastrale de Locronan sous le numéro 89p de la section 1, pour une contenance de quarante cinq centiares.
Une cour faisant suite au pignon couchant de ladite maison, entourée de murs, avec ebtrée au nord sur la route de Châteaulin à Douarnenez, donnant du sud sur le cimetière et du couchant sur Bourbao, figurant à l'ancienne matrice cadastrale sous le numéro 88p de la section 1, pour une contenance de 26 centiares.
Tel au surplus que le tout figure à la nouvelle matrice cadastrale de la même commune sous le numéro 70 de la section A, pour une contenance de 89 centiares."
Les vendeurs sont Marie Louise Piclet, veuve de Jean Louis Boulic, et les enfants du premier mariage de ce dernier avec Marie Renée, sœur de Marie Louise ; Joseph, René, Germaine et Pierre Boulic. Jean Louis Boulic avait acquis ce bien aux termes d'une adjudication 19 mars 1906, des mineurs de Pierre Boulic et Eugénie Princelle, qui les avaient recueillis d'Emmanuel Princelle et Aline Cléro, père et mère d'Eugénie. Il est écrit dans l'acte que "ces derniers en étaient propriétaires pour avoir construit la maison sur l'emplacement par eux acquis" de la famille Roignant de Gouérec en Quéménéven, suivant un contrat de vente du 4 février 1879. Les Roignant possédaient le lot 88 de l'ancien cadastre, sur lequel est enregistré une démolition de maison en 1865. Nous avons déjà vu que les Princelle avaient le lot 89 depuis 1869. Ils possèdent donc les emplacements nécessaires pour édifier le nouveau bâtiment, mais nous n'avons pas découverts la date exacte de construction.
Après plusieurs feux éteints et allumés, la dernière enchère sera finalement mise par Thomas Quéffélec, veuf de Marie Jeanne Gestin, garde-chasse, demeurant au lieu-dit "Maner-Lozach", en la forêt de Névet. Jusqu'en 2021, elle sera occupée par sa fille Simone, veuve de Yves Horellou
Notes
1 Arch. Dep. Finistère, 1 Q 180, Expertise du four banal de Locronan, 1791.
2 Arch. Dep. Finistère, 1 Q 183 , Vente du four banal de Locronan, 1792.
3 Arch.Privées, Adjudication volontaire d'immeubles sis en la ville de Locronan, au profit de Monsieur Thomas Quéffélec, 1938.