Leustec

Le nom du Leustec apparait déjà écrit sous cette forme dans les aveux du prieur au roi de 1550 et 1557, où l'on peut lire : "Item dessus les terres du Clech au Leustec une rennée fourment que [soulloyt?] paier Henry le Clech une rennée fourment".1

A cette époque, le village du Leustec était partagé en deux parties par le grand chemin qui conduit de Locronan à Châteaulin, l'une située en Plonévez-Porzay et l'autre en Locronan. Cette dernière se trouvait dans la juridiction du prieur de Locronan, selon l'aveu de 1680, qui cite :  "le lieu et village de Leustec ayant d’étendue vingt deux journals et demy profité par René Philipe et consorts en qualité de domeiniers sous le seigneur de Rozaven Moreau à la charge de payer par an de chefrante audit seigneur prieur un comble froment et un comble avoinne"2.

Le fond appartient à cette date à Henry Moreau, sieur de Rozaven, époux de Janne Breton, qui décède en 1682. Il sera transmis à son fils Louis, marié avec Suzanne Guertin, puis à sa petite fille Suzanne, qui décède sans héritier direct en 1768. En 1758, ses domaniers Anne Thomas (Veuve de Thomas Hémon) et Yves Brélivet lui consentent chacun une déclaration des terres qu'ils exploitent au Leustec3.

Après son décès, le village revient à ses neveux, enfants de sa sœur Gilette et de Guillaume de Leissègues : Jacques de Leissègues, sieur de Kergadio, époux de Guillemette le Minor, et Guillaume de Leissègues, sieur de Rozaven, marié avec Marie Guesdon. Ces deux couples auront chacun une part du Leustec.

Guillaume de Leissègues décède en 1787, et sa succession entre ses cinq enfants vivants n'est pas encore réglée au début de la Révolution.  Et comme Jean-Louis, père de Rozaven, a émigré, sa part doit revenir à la nation. Il faut donc faire un inventaire des biens (en 1799), où l'article 16 est relatif au Leustec4 :

"Puis nous nous sommes transportés au lieu du Leustec situé commune de Locronan canton du même nom tenu à domaine congéable par Louis Cosmao, René Brélivet et Marianne Petitbon pour payer annuellement la somme de quatre vingt sept francs.

Sous terre chaude dix hectares trois ares huit déciares

Sous terre froide quatorze hectares neuf ares un déciares  

Total vingt sept hectares un are seize quatre vingt six centimètres quarrés".

Seule la part de Jean Louis de Rozaven, celle qui revient à la nation, est ensuite décrite en détail. Elle ne contient pas le village du Leustec, qui doit donc revenir à l'un des quatre autres héritiers.

Sur la matrice cadastrale de 1808, le village appartient à Louise de Leissegues, de Quimperlé, ayant Louis Cosmao comme domanier, et à Caroline de Kergadio, qui a deux domaniers, André le Bris et René Brélivet.

Ces domaniers, ou leurs épouses, étaient les descendants de ceux du siècle précédent. Louis Cosmao, occupe le village depuis son mariage en 1773 avec Jeanne Gourlaouen. Cette dernière avait pour parents, Guillaume Gourlaouen et Marguerite Bossennec, et pour grand-parents Yves Gourlaouen et Janne Mazéas, tous du Leustec.

Les ancêtres de René Brélivet y demeuraient depuis le début du XVIIème siècle : René était le fils de Yves et de Jeanne Riou (les déclarants en 1758), petit-fils de Fiacre et Eliette Kernaleguen, arrière-petit-fils de Guillaume et Marie Philippe. Guillaume, laboureur de terre au Leustec, était né en 1633 de Pierre et Catherine Goriou.

René Philippe, mentionnée dans l'aveu de 1680, décède au Leustec le 18 mars 1691 à l'âge de 68 ans. Ses successeurs seront sa fillle Anne, mariée à Michel Thomas (laboureur au Leustec), Ronan Thomas et Elizabeth Millour, leur fille Anne Thomas et son mari Thomas Hémon, domaniers en 1758. En 1808, Marie Anne Lastennet, épouse d'André le Bris, est leur arrière-petite-fille.

Louise de Leissègue, religieuse à Quimperlé, était l'une des filles de Germain Louis de Leissègues de Rozaven. Elle avait reçu le village du Leustec lors du partage de 1799. Il n'y a aucune mention de Caroline de Kergadio dans les registres d'état civil. Il s'agit probablement de Charlotte Jeanne Gilette Leissègues de Kergadio, qui dans un acte de 1809, "déclare bailler, céder et délaisser à titre de domaine congéable et réparable pour le temps et espace de neuf années  entières et consécutives qui ont commencées le vingt septembre 1806 et finiront à pareil jour et terme après lesdites neuf années expirées et révolues, auxdits Marie Anne Petibon, André Le Bris, et René Brélivet prenants et acceptants la tenue dont ils jouissent actuellement audit lieu du Leustec…".5  

En 1847, les propriétaires sont Louise Zélie de Kerdroniou, nièce de Louise de Leissègues, qui a pour domanier Alain Le Bihan, gendre de Louis Cosmao, et Marie Rousseau de la Valinière, épouse d'Armand Taconnet, les neveux de Charlotte Leissègues de Kergadio dont les domaniers sont Pierre Le Bris, fils d'André, et Louis Marot, gendre de René Brélivet. Signalons en outre qu'en 1850, la partie située en Plonévez-Porzay appartient aussi à Louise de Kerdroniou (domanier Alain Le Bihan), et à Armand Taconnet (domanier Pierre Le Bris).

Nous constatons que les héritages sont restés au sein des mêmes familles depuis de XVIIème siècle, aussi bien pour les propriétaires que pour les domaniers.

L'une des activités du Leustec devait être le tissage, comme dans les villages voisins. Mais nous n'avons trouvé aucun inventaire mentionnant le métier à tisser. Par contre, la déclaration de 1758 contient un "courtil à filace ou à chanvre", et en 1847, le lot 184 une pâture avec deux routoirs.

Le Leustec à Locronan en 1847

Nom des champs en 1847 :

 Al Leur Guer (191), Al Leur Guer Hir (185, 193), Al Liors Bian (194), Al Liors Bras (192,197), Ar Bar Hir (209), Ar Bar Huela (207), Ar Bar Izella (208), Ar Gonidou (210,211), Ar Jardin (199), Ar Verger (195), Foennec al Leur Guer (182), Foennec ar Pont (183), Foennec Bian (178) Foennec Nevez (181), Foennec St Guénolé (179), Jardin ar Leur Guer (186), Jardin Daouanler (187,188), Liors Parc ar Coadic (202), Parc al Leur Guer Hir (177), Parc ar Coadic (203), Parc ar Groas (225), Parc ar Men Bris (219-222), Parc Bian (205), Parc Nevez (206).

Notes

1 Arch. Dép. Loire-Atlantique, B 800, Rentiers du prieuré de Locronan, 1550 et 1557.
2 Arch. Dép. Loire-Atlantique, B 1164, Rentier du prieuré de Locronan, 1680.
3 Arch. Dép. Finistère, 4 E 36 68, Déclaration fournie à la delle Moreau par Anne Thomas de 29 mars 1758 pour le Leustec, et par Yves Brélivet le 30 mars 1758.
Les actes eux-mêmes sont à la cote 4 E 36 18.
4 Arch. Dép. Finistère, 1 Q 507, Prisage des biens provenant de la succession de feu Guillaume Louis Leissègues-Rozaven, 1799.
5 Arch. Dép. Finistère, 4 E 36 63, Baillée à domaine congéable consentie par Demoiselle Charlotte Jeanne Gilette de Leissègues Kergadio, de Penhars, à Marie Anne Petibon, André Le Bris et René Brélivet, 1809.